Conjuguée à des nouvelles de plus en plus inquiétantes sur le front économique, la multiplication des manifestations contre la politique zéro-Covid aura eu raison de la détermination des autorités chinoises : après avoir annoncé une « nouvelle phase » dans la gestion de l’épidémie, Pékin relâche sa politique draconienne de confinement et de mise en quarantaine, qui cristallisait la colère de Chinois de plus en plus nombreux.
Ce changement de cap interroge autant la nature du régime de Xi Jinping que son évolution récente. La survenue de l’épidémie fin 2019 avait offert au pouvoir l’occasion d’un durcissement sans précédent de la politique de surveillance et de contrôle de la population, au nom de sa protection. Le choix renouvelé de la stratégie zéro-Covid, avec des conséquences massives sur l’économie du pays, avait montré que les considérations idéologiques l’emportaient désormais sur toute autre aux yeux des dirigeants.
Les manifestations de ces derniers jours ont parfois été comparées à celles de 1989 sur la place Tiananmen. L’exaspération de résidents mis en danger par les mesures de confinement s’est rapidement teintée en effet de considérations plus politiques, contre le régime et sa pratique de la censure notamment. Les manifestations d’étudiants, ou le geste consistant à brandir une feuille blanche, en ont été les témoignages les plus visibles. La mainmise de Xi Jinping sur le parti interdit sans doute de pousser trop loin la comparaison, mais la colère des Chinois nous rappelle que le totalitarisme n’arrête pas l’histoire, et comme l’écrivait Jean-Luc Domenach en 1984, que le pouvoir doit toujours compter avec la société qu’il opprime. Dans ce corps à corps, les sociétés respirent encore.
La rédaction